De même que le chaos tumultueux de l'orage apporte la pluie nourrissante                                                                                                      

                                                                                                    qui permet à la vie de prospérer, de même, dans les affaires humaines,

                                                                                                    les temps de progrès sont précédés par des temps de désordre.

                                                                                                    Le succès vient à ceux qui peuvent supporter la tempête.

                                                                                                                                               Yi Qing

                                                                                                                                                                                                                           

Et si on s’écriait : Vive la crise !


Un mot constitue le dénominateur commun de la plupart des infos que nous entendons dans les media : la crise.

Crise financière bien sûr, mais aussi crise économique, crise sociale, crise de confiance envers le monde politique, crise de l’emploi, crise écologique, climatique,  crise des valeurs…

A ce niveau là, on ne peut plus parler de crise, surtout quand elle dure si longtemps, il est question en réalité d’une mutation profonde de notre monde.


Et du fait de notre double dimension individuelle et sociale, cette exigence de mutation collective est aussi adressée à chacun d’entre nous de manière subliminale. Le message est clair : il y a urgence à inventer une autre manière d’être au monde avec soi, avec les autres et avec la planète entière.

Cela peut engendrer beaucoup d’angoisse et cela érode des positions de sécurité, en nous et autour de nous.


Et du coup quand nous sommes confrontés, comme tout organisme en croissance, à un moment de déstabilisation personnelle, (que ce soit en passant d’un âge à l’autre de la vie, ou du fait d’une remise en question de liens affectifs ou de notre identité sociale ou  professionnelle), les deux processus entrent en résonance : nous sommes doublement remis en question, ce qui n’est pas confortable du tout !

Alors nous cherchons quelquefois à fuir ou à ignorer ce qui nous arrive (« ça va passer »), en continuant à mener notre vie comme si de rien n’était…


Mais… que nous fermions les yeux sur le problème ne l’empêche pas d’être là ! 

Alors, si nous regardions ensemble ce qu’est cette crise qui nous fait si peur ?


Qu’est-ce donc au fait qu’une crise ?


D’où vient ce terme et quel est son sens profond ?

Deux étymologies peuvent nous aider à comprendre quelle est la réalité contenue dans ce phénomène.


En grec « krisis » désigne le moment où est énoncée la sentence, dans un jugement. C’est donc un moment de bascule entre un avant et un après qui est défini par la teneur de la sentence. C’est, au
terme de l’aboutissement d’une réflexion collective, une évaluation de l’adéquation ou de l’inadéquation de la conduite d’un homme ou d’un groupe humain au regard des lois de son époque et de sa culture.

La crise nous amène à évaluer la manière dont nous avons conduit notre vie, affective, professionnelle, personnelle, sociale…


Vous savez peut-être qu’en chinois le concept de crise s’exprime à l’aide de deux idéogrammes : le premier signifie occasion et le second danger.

L’occasion ici est une occasion de croissance, que ce soit sur le plan physique, psychologique ou spirituel.

Le danger est lié au fait que l’ancien équilibre est rompu et que rien n’assure  a priori qu’un nouvel équilibre soit atteint.  Il y a un risque qui ne peut être supprimé, comme dans tout processus vivant.

C’est pourquoi aussi dans notre société qui vise l’hyper contrôle, la crise psychologique est mal vue et souvent niée, refoulée, avec l’aide d’une contention physique* (médicaments) ou comportementale (addictions de toutes sortes).                     


En médecine, la crise vitale est aussi le point de rupture de l’équilibre que constitue la santé.

Dans la conception d’Hippocrate, médecin dans la Grèce antique, la maladie est comprise comme une tentative de retrouver la santé, c’est-à-dire un état de bien-être global qui a été perdu, du fait d’un décalage entre les exigences de la vie et les réponses que l’individu lui apporte.

La maladie est alors le témoin d’une nécessité d’évolution induite par le processus de la vie, processus qui ne revient jamais en arrière et fait émerger sans cesse du nouveau. Une fois surmontée la crise induite par la maladie, le nouvel équilibre intérieur sera meilleur en termes de survie et d’autonomie que le précédent, par exemple on aura augmenté ses capacités de défense immunitaire.


Cette dynamique est tout-à-fait transférable au niveau psychologique, affectif, intellectuel ou spirituel.

La crise est difficile en ce sens qu’on ne choisit pas le moment où elle survient : elle nous prend souvent de court, et nous met face aux résultats de nos actions passées, individuelles ou collectives.

Mais elle constitue par elle-même un fantastique potentiel de révolution, de changement personnel, interpersonnel et/ou social.


C’est ainsi qu’une crise dans un couple ne sonne pas le glas de la relation entre les deux membres du couple mais seulement de la modalité relationnelle établie entre ces deux personnes. Comme le homard quand son enveloppe devient trop oppressante, le couple doit augmenter son espace de vie pour permettre la croissance de chacun de ses membres.

En effet, comme la vie est intelligente, la relation se construit d’abord en permettant à chacun de trouver en l’autre ce dont il a besoin (sécurité, reconnaissance, confiance, rayonnement). Mais ensuite,
chacun ayant grandi, a des besoins et des aspirations différents. Et l’on commence à voir chez l’autre celui ou celle qui nous empêche de vivre et l’on considère qu’il/elle ne peut plus rien nous apporter. Quand on est confronté à ce genre de problème, on a tendance à penser « je ne l’aime plus, on se sépare ». En fait souvent, on interrompt un processus de maturation qui reprendra au même point avec le prochain partenaire, une fois l’état amoureux dissipé…

Car le couple est la matrice dans laquelle s’engendre et mûrit une relation d’amour : amour de soi, amour de l’autre, amour de l’amour.


De la même façon, dans la relation entre parents et adolescents, les oppositions, conflits, réactions violentes…


Si nous revenons en pensée sur les différents moments de crise que nous avons traversés dans notre vie et à travers lesquels nous avons grandi, nous pouvons dire alors : Vive la crise !


Heureusement que je me trouvais à l’étroit dans le ventre de ma mère

Heureusement que les virus et les bactéries m’ont attaqué sans relâche pendant des années

Heureusement que mon corps s’est transformé à l’adolescence

Heureusement que j’ai perdu cet emploi ...


Et merci à la vie qui me donne encore aujourd’hui une occasion de grandir en conscience, de mûrir, de faire un pas de plus sur mon chemin d’humanité !


                                                                                                                                                                                                     Catherine FAVRE


  1. *Il est montré qu’une prise d’antidépresseurs favorise une régulation de l’humeur qui soumet le cerveau frontal à un contrôle par les structures sous-jacentes, alors que la psychothérapie, la pratique de la sophrologie ou de la méditation, favorisent le processus inverse, donc la régulation par la conscience des structures impliquées dans la production des émotions. A chacun de choisir son camp !

  2. http://www.iris-formations.fr/Espace_curieux/Entrees/2012/7/19_Regulation_emotionnelle___regulation_neurobiologique_Top_-_Down_Etude_presentee_par_Guido_Bondolfi.html



  


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